L'HISTORIQUE DE LA COURTINE Bulletin Municipal du 01/01/1993 |
Lorsqu'en
1804 Monsieur l'Abbé Antoine BROQUIN est
nommé curé de la paroisse de LA COURTINE, il ne trouve plus rien et
tout est à refaire. La révolution avait soufflé sur toute la France,
n'épargnant ni les villes, ni les campagnes. La maison curiale et le pré
attenant avaient été vendus comme biens nationaux en 1793. Il fut donc
obligé de se loger dans une maison du bourg, mal
commode et éloignée de l'église. Les vases sacrés,
les tableaux, les statues, avaient disparu. Il en
était de même pour la balustrade en bois ancien
tourné et le devant d'Autel en cuivre doré,
dont Monsieur l'Abbé MICRON faisait mention dans l'inventaire de l'église
de Saint-Dionis. Seule une cloche semble
avoir échappé à la folie destructrice
du moment. Elle se trouve maintenant
dans le clocher qui a été restauré et qui fut celui de l'église de Saint-Denis. Sur la cloche on peut voir :
un doigt pointé indiquant ce qui fut gravé
sur ses flancs il y a 210 ans : (l'orthographe a été conservée) : «
Parein Mr HYVE amable compte de la Roche Briant - Maraine Dame Jeanne
de BOISREDONDE »
«
De Pierre LACOUR Baronne et épouse de Mr François DE MONAMY De
MIRAMBEL »
«
ROCHEFORT Curé- Pierre MARSALON et GILBERT- Mr Jean GARODE 1783 ».
Le
milieu de la cloche est ouvragé d'un Feston,
puis sur le bas de la panse, on découvre en tournant: une vierge tenant l'enfant Jésus dans ses bras,'une
croix, des armoiries semblables à celles
qui sont sur la pierre gravée, à gauche de la façade de notre église actuelle, et enfin un corps humain sans
tête, personnifiant certainement Saint-Denis
(puisque celui- ci fut décapité).
Quant
à la deuxième cloche, dont on voit l'emplacement
à côté de la précédente, un mystère plane
sur sa disparition. Les Anciens du village ont ouï-dire par leurs
parents qu'à la révolution elle avait été
cachée... mais hélas, jamais personne n'a
pu la retrouver. Cependant la tradition orale rapporte que sur ses flancs
on pouvait lire : « Marie-Thérèse je me
nomme et 500 livres je pèse - Celui qui ne veut pas me croire me repèse
».
Malgré
tous les changements de régime, les paysans sont
toujours aussi pauvres et la terre, ingrate, ne
peut suffire à nourrir ses habitants. Aussi les
hommes commencent à s'expatrier vers les grandes villes, et partent
comme maçons, paveurs, tuiliers, cochers de
fiacre ou scieurs de long. Pour
s'occuper des propriétés il ne reste que les vieux parents et les femmes. Celles-ci sont courageuses
et économes. Elles partagent tous les travaux pénibles de
l'agriculture, labourent, conduisent les charrettes, soignent les bestiaux, sans
pour autant négliger les occupations de la maison
et élever les enfants souvent nombreux. La
principale culture est celle du seigle qui sert de
nourriture une grande partie de l'année. Quant à
la paille elle sert de couverture aux bâtiments. Comme
il y a beaucoup de landes on fait l'élevage des moutons. La grand-mère file la laine et tricote pour
toute la famille d'un bout de Tannée à l'autre.
On engraisse un ou deux porcs ainsi qu'un peu de volaille pour la consommation familiale. Mais
les propriétés sont petites et très parcellées, ce
qui donne lieu à de nombreuses contestations et chicanes, aussi le département
de la Creuse comptait proportionnellement au reste de la France
un grand nombre d'avocats, de notaires, d'avoués, d'huissiers, tous
hommes de loi plus enclins à envenimer les
différends plutôt qu'à les apaiser.
C'est
à l'occasion des grandes foires du département que se vendent les moutons et
les mulets de La Courtine qui sont très réputés
ainsi que le miel savoureux, récolté
dans de nombreux « bournats » (ruches) placés au milieu des bruyères
communales. Un autre commerce aussi très
florissant, est celui des « CHEVEUX ». Les jeunes
filles du pays n'hésitent pas à sacrifier leur magnifique
chevelure pour l'échanger contre des châles
imprimés, des fichus de soie, des morceaux de mousseline ou de dentelle qu'elles mettront le jour
de leurs noces. Ces cheveux sont envoyés à PARIS
où d'habiles perruquiers les transforment en
coiffures pour les élégantes de l'époque.
On se souvient que depuis Monsieur l'Abbé MICHON, les curés de La Courtine étaient aussi ceux
de Saint-Denis et de La Daigue. C'est certainement Monsieur l'Abbé PARRET, qui
était curé depuis 1810, qui a fait placer dans l'église de ce village une cloche sur laquelle on peut lire : « Cloche de La Daigue 1827 - Blaize FRONTY
Parrain - Marguerite GARRY Marraine ». Elle
fut coulée par les établissements P HÉRITIER - Fondeur à Clermont - comme l'indique
le poinçon gravé dans le bronze.
Au
début du XXème siècle, lors de l'annexion par
le camp militaire du village de La Daigue, le reliquaire de saint-Loup,
patron du lieu, ainsi que les cloches furent transportés à La Courtine.
Celle dont nous
venons de parler est installée dans le clocher
de l'église paroissiale.
Depuis 1824, La Courtine avait comme Maire M. Pierre-Alexis ALLÈGRE qui le resta jusqu'en 1830. C'est à cette époque qu'une nouvelle fois le pays subit une terrible épidémie : « la fièvre typhoïde » qui fit de nombreuses victimes. Hélas, cela n'aida pas la population, déjà très affectée par sa pauvreté, à se relever de celle-ci...
Geneviève LEYSSENE