L'HISTORIQUE DE LA COURTINE

Bulletin Municipal du 01/01/1992

La COURTINE est un chef-lieu de canton de l'arrondissement d'AUBUSSON, canton ayant au dernier recensement 2383 habitants.

La COURTINE, quant à elle a une population de 1398 habitants. Elle était déjà au II siècle de notre ère une des plus importante localités de la Montagne Limousine. On trouve son nom écrit de différentes manières : DOMINUS de CORTINA au XIVème siècle qui infirme la thèse souvent émise qui consiste a la rapprocher des « courtines » de la forteresse féodale.

Vers le IXèmc ou le Xème siècle, les moines Bénédictins construisirent un monastère près de la rivière La Liège, peu à peu la population vint s'y grouper et y éleva une église, que la tradition et quelques restes représentaient au XIIème siècle, comme fort belle et fort grande. Celle-ci ainsi que le monastère furent incendiés au début du XVème siècle par les « Chevaliers d'Auvergne » pour en chasser les Anglais. Tout fut détruit. Les moines se retirèrent alors dans leur puissante Abbaye de « Saint-Michel des Anges » devenue Saint-Angel en Corrèze. L'église fut reconstruite par les habitants, mais dans des proportions plus restreintes; en effet avec le cimetière et une petite place elle représentait 40 toises de long et 30 de large ( cette ancienne mesure française de longueur valait 1,949 m ).

Or, en Juin 1741, Monseigneur Jean Gilles du CŒTLOSQUET, évêque de LIMOGES, vient dans la région, en tournée pastorale. Il trouve trois églises : celle de la COURTINE, de SAINT-DENYS et de la DAIGUE tombant en ruines et ne pouvant plus servir pour l'exercice du culte, aussi les frappe-t-il d'interdit. De l'ancien village de la COURTINE il ne reste que quelques maisons situées autour de l'église ou sur la butte en face appelée « La Chabane » , maintenant appelée « Le Chabanou ».

A cette même époque Monseigneur l'Evêque ayant nommé Monsieur l'Abbé MICHON, qui était alors Curé de FLAYAT, Curé de la COURTINE, celui-ci prend possession de son poste le 15 Juillet 1741. Il demande l'autorisation de démolir l'ancienne église et d'en reconstruire une nouvelle.

Après de nombreuses difficultés et tracasseries, il arrive enfin à édifier l'église actuelle avec le portique et les pierres de l'ancienne église ainsi que celles du château.

A voir l'importance que l'on donnait à l'entreprise de cette église, on serait porté à croire qu'il s'agissait d'une construction monumentale. Hélas ! il n'en était rien. Il fallait une église, on ne pouvait l'entreprendre qu'en fonction des ressources que l'on avaient. L'Abbé MICHON était pauvre, les paroissiens plus pauvres encore. Construite à l'emplacement de l'église actuelle, elle était loin d'avoir les dimensions et les proportions que l'on s'imagine lorsque l'on regarde l'édifice de maintenant. Elle fût construite de façon modeste, dans le genre des église de l'époque : Saint-Oradoux-de-Chirouze, Malleret, Beissat, que nous avons le plaisir de pouvoir encore admirer. L'église du Mas-d'Artiges fut construite début 1800.

Ce n'est que 150 ans plus tard que l'Abbé VILLATEL se fera lui aussi Curé bâtisseur et la reprendra, la modifiant, l'agrandissant, pour en faire enfin l'église que l'on voit aujourd'hui.

La première pierre fût donc posée le 31 Mai 1742. (Ce n'est évidemment pas celle au dessus de la porte montant au clocher). Elle est placée sous le pilier massif entre la Chapelle de Saint-Jean et le chœur. Elle est taillée à 6 faces ornées d'une croix et porte cette inscription : « Tu es PETRUS et Super HANC PETRAM AEDIFICABO ECCLESIAM MEAM ».

La démolition de l'ancienne église, près de la rivière, reprit activement. Une dernière messe y fût dite en Juillet

1742 ; puis le Saint-Sacrement ainsi que la statue de Notre-Dame furent transportés dans une pièce à La Courtine. Cependant, 2 mois 1/2 après le début des travaux, la sacristie qui se trouve" derrière le chœur et les chapelles dédiées l'une au Saint-Rosaire, l'autre à saint Jean-Baptiste, secondaire de l'église, sont terminées et servent d'église jusqu'au complet achèvement de l'édifice. Fin 1743 tout est terminé ; la charpente du clocher montée en Octobre et la croix de fer bénite, placée le 2 Novembre. Le dit clocher monté en bonnet carré fût fini de couvrir le 25 Novembre, jour de la sainte Catherine, mais depuis le 15 Novembre

1743 on pouvait dans l'église adorer à nouveau le Saint Sacrement.

Le 22 Août 1749, Monseigneur de COETLOSQUET, évêque de LIMOGES, arrive à LA COURTINE. Quelle différence et quel étonnement pour lui, entre cette visite et celle de Juin 1741.

Le 26 Août, il consacre l'église avec toute la solennité que comportait un tel événement pour une contrée comme la notre et une telle cérémonie à cette époque. Entouré de nombreux prêtres des paroisses voisines : « les reliques furent mises dans la pierre qui fût sacrée pour table d'autel, dans une fiole de cristal double, avec l'écrit signé du dit Seigneur évêque, sur le vélin ».

Il avait fallu moins de deux ans à l'Abbé MICHON pour venir à bout de l'église de LA COURTINE. De quel acharnement et de quel courage il avait dû faire preuve !

Hélas ! le 17 Août 1745 à 2 heures de l'après-midi, un nuage qui paraissait sur la paroisse de Saint Martial, sans pluie ni grêle, fournit un orage et la foudre tomba sur le clocher de la nouvelle église, brisa plusieurs pièces de charpente, endommagea le couvert de l'église et des chapelles, perça le mur du clocher depuis le haut jusqu'à la porte qu'il mit en pièces et sortit par la croisée de la nef sans mettre le feu. Les dommages causés furent réparés en 1 mois }/2 et coûtèrent 100 livres d'argent.

A la même période, sa sollicitude se porte sur l'église de SAINT-DENYS. Bien que cette église soit prise pour mère des deux autres : La Courtine et La Daigue, elle aussi est en ruine. Elle est située au milieu de la paroisse, le cimetière y attenant. Les chapelles sont dédiées à saint Denys et à saint Barthélémy. « Couverte en paille, elle prenait l'eau de tous côtés, pavée en pierres brutes, point de clocher, point de fenêtre, point d'autel, aucun ornement... ».

Les paroissiens de Saint-Denys, heureux de sauver leur vieille église, se montrent très généreux. Peu à peu, tout se restaure, s'embellit, et en 1744 elle est de nouveau ouverte au culte, presqu'en même temps que celle de La Courtine. Un souvenir reconnaissant doit être noté aux « Seigneurs de LA FOSSE » qui accordèrent, dès le début, un généreux concours pour la restauration de l'église. Leur château dont il ne restait que des ruines en 1744, était situé sur « le Puy des Sales », à droite du chemin de FENIERS.

Presque tout a disparu dans la suite des temps. Il est à regretter la disparition de deux cloches sur les trois que l'église possédait. Faite en 1756 l'une pesait 600 livres, la seconde 210 et la troisième 140 (livre : ancienne unité de poids valant 489,5 grammes). Que devinrent-elles pendant la révolution ?

Il restait la chapelle de La Daigue « Aqua Deï, Eau du Bon Dieu », ainsi appelée à cause de l'eau excellente de sa fontaine. Là aussi tout était à refaire. La chapelle n'était plus que ruine. L'unique statue, celle de saint Loup, patron de la paroisse, dans laquelle étaient insérées les précieuses reliques du Saint, était déposée à l'église de Saint-Denys. Dès que les travaux de reconstruction le permirent, l'Abbé MICHON y rapporta solennellement en grande procession, le reliquaire. Il érigea une grande Croix de pierre et planta des arbres autour de la chapelle. Là aussi tout a disparu, même le village qui fût annexé par le camp militaire au début du siècle.

Pour mémoire, il faut signaler qu'autrefois il y avait aussi au village du Lombarteix, une église dédiée à saint André. Cependant, il semblerait que du temps de l'Abbé MICHON elle avait déjà disparu depuis au moins 200 ans, et qu'il n'était même plus possible d'en situer l'emplacement.

Geneviève LEYSSENE

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